C’est l’italien Bartolomeo Cristofori (1651-1731) qui créa le
premier « piano-forte » en 1709, en remplaçant les sautereaux du clavecin qui pincent la corde, par des petits
marteaux. Cela permettait au toucher de passer par toutes les nuances du piano
au forte, comme dans le clavicorde,
mais avec beaucoup plus de puissance.
Un marteau articulé indépendant mû par un pilote situé au bout
de la touche vient frapper plus ou moins vivement la corde pour s'en dégager
aussitôt tandis qu'un étouffoir (pièce de cuir ou feutre) vient éteindre le
son de cette note dès que la touche est relâchée.
Ce type de mécanique a été utilisé en 1726 par Gottfried
Silbermann (1683-1753) pour construire le premier pianoforte allemand, sur
lequel il créa la pédale dite « forte » qui permet de soulever
simultanément tous les étouffoirs. Silbermann présenta cet instrument à J.S.
BACH qui ne fut pas enthousiaste, mais il perfectionna peu à peu sa technique,
et parvint au succès en 1747, au point que le Roi Frédéric II de Prusse, enthousiaste, en commanda quinze
exemplaires, et que Jean Sébastien Bach lui-même finit par
reconnaître la qualité de ces instruments.
Le pianoforte se développe ensuite en Angleterre, en France et en
Allemagne et voit apparaître différentes sortes de mécanique.
La mécanique « anglaise »
En Angleterre, en 1772, Americus Backers ajoute un système
d’échappement qui consiste en l'abandon du marteau par le pilote (pour
permettre au marteau de retomber même la touche enfoncée).
Cette technique fut ensuite développée par John Broadwood et
Robert Stodart.
L’attrape permet de freiner le marteau au retour, afin de
l’empêcher de rebondir.
La mécanique « viennoise » ou « allemande »
En 1785, Johann Andréas Stein (1728-1792), élève de Silbermann, mit
au point un nouveau système d'échappement des marteaux permettant d'obtenir
une meilleur qualité sonore et de jouer des pièces plus rapides.
Le marteau repose horizontalement sur la touche qui, en
s'enfonçant, le soulève au moyen d'une fourche fixée à l'extrémité de la
touche ;
la pièce qui retient l'extrémité du marteau est mobile grâce à un
petit ressort, elle permet ainsi l'échappement, c'est-à-dire la
libération du marteau.
Ce piano connut un grand succès et était notamment très apprécié
par Mozart.
La mécanique viennoise n’a pas supporté la concurrence de la
mécanique dite « Anglaise » surtout après qu’Erard inventât en 1821
le « double échappement » , permettant la répétition aussi rapide que
possible de la même note par le fait que le marteau se trouve déjà au cours de
sa chute relancé vers la corde
Le piano et les compositeurs classiques
Les premières sonates à avoir été expressément écrites pour le
pianoforte le furent par Lodovico Giustini (1685-1743), et furent publiées en
1732.
Le cahier comporte 12 sonates. Il en existe quelques enregistrements, dont un
intégral sur une copie d'un instrument de Cristofori.
Mais c’est Clémenti qui fut le 1er grand compositeur
pour le piano. Il est le trait d’union entre le baroque de Scarlatti et le
romantisme de Beethoven.
Clementi : sonate op 40 n°3
Mozart: Sonate n°8 K310
Beethoven : sonate n° 23 "Appassionata"
Evolution du piano au 19e siècle
Au 19e siècle, le piano connait des évolutions
importantes qui vont permettre aux compositeurs romantiques de donner le
meilleur d’eux-mêmes pour cet instrument.
Deux noms ressortent principalement dans cette évolution :
Sébastien Erard et Henri
Pape.
Piano Broadwood de 1817 ayant appartenu à Beethoven.
Piano Erard de 1833
L’évolution la plus importante est sans doute la mécanique à
double échappement (ou à répétition) qui permet la répétition rapide
d’une même note. Ce système, mis au point en 1822 par Sébastien Erard,
améliore également le toucher, permettant ainsi de mieux contrôler le jeu
pianistique et d’augmenter la virtuosité. Cette mécanique sera améliorée et
breveté par son neveu Pierre Erard en 1833, et équipera progressivement tous
les pianos à queue jusqu’à nos jours.
Principe
du double échappement
La mécanique à double échappement fait intervenir un levier de
répétition (5) associé à un ressort (6). Celui-ci pousse le marteau (3)
vers le haut par le levier de répétition et le levier d’échappement (4) vers
le bas.
Après avoir joué une note en enfonçant la touche(1), le marteau (3)
est tenu par l’attrape (2).
Dès que l’on relâche la touche (1), le marteau (3) se libérant
de l'attrape (2) est aussitôt replacé par l’action du ressort (6) et du
levier de répétition (5) au-dessus du levier d'échappement (4), permettant
de rejouer la note avant que l’on ait relâché entièrement la touche (1).
Ainsi, il suffit de relever la touche de deux millimètres pour permettre à
une nouvelle note d’être jouée.
Par ailleurs, Sébastien Erard a créé en 1810 le pédalier du piano
à queue toujours présent sur les pianos modernes. Ce pédalier comprend 2
pédales :
-La pédale de gauche dite douce ou « una corda», qui déplace
l’ensemble des marteaux de manière que 2 cordes par note au lieu de 3 soient
jouées.
-La pédale de droite dite forte qui maintient tous les
étouffoirs soulevés, laissant les cordes vibrer librement.
Sur certains pianos modernes, on trouve une 3e
pédale au milieu, dite tonale ou sostenuto, qui permet de maintenir relevés les
étouffoirs des notes jouées, et seulement celles là.
Sur les pianos droits, la pédale douce ne déplace pas les marteaux
mais les rapproche des cordes de manière à diminuer la vitesse de frappe.
Henri Pape, facteur allemand installé à Paris, apporte de
son côté de nombreuses améliorations :
Les cordes filées équipant les notes les plus
graves du piano.
Feutre « Henri Pape » en poil de lapin
d’un piano Pleyel de 1845.
-En 1813, il utilise des cordes filées de cuivre.
-En 1826, il introduit l’emploi de feutre pour recouvrir les
têtes des marteaux.
-En 1827, il utilise des cordes en acier trempé permettant une
plus grande force de traction.
-En 1828, il invente le système des cordes croisées qui améliore
la stabilité mais surtout le son car cela permet un meilleur positionnement des
chevalets sur la table d'harmonie.
-En 1844, il construit le premier piano à queue à huit octaves.
Par ailleurs,le cadre en fonte est breveté aux États-Unis par Alpheus Babcock en 1825 et sera
adopté en France par PLEYEL. En 1866, Carl RÖNISCH développe le premier
cadre en fonte blindé complet à cinq brides qui est le cadre de référence
utilisé aujourd’hui dans la fabrication des pianos à queue.
Toutes ces améliorations résultent souvent d’une étroite
collaboration entre les facteurs de piano et les compositeurs. Ainsi Beethoven a de nombreux échanges avec le facteur Broadwood et
se voit offrir, en 1803, un piano par Sébastien Erard.
Liszt quant à lui commande ses instruments à Erard et Chopin travaille avec
Pleyel.
Le piano et les compositeurs romantiques
Le piano est l’instrument le plus représentatif de la période romantique.
Les plus grands compositeurs romantiques pour le piano sont Chopin, Liszt, Schumann et Mendelssohn.
Ils s’expriment à travers de nouvelles formes de pièces brèves telles que Préludes, Nocturnes, Impromptus, Ballades, Valses, Mazurkas, Polonaises, Etudes etc ...
Schubert : impromptu D899 n°3
Chopin : Nocturne op.9 n°1
Schumann : Scènes d'enfants
Mendelssohn : 3 romances sans paroles
Liszt : Consolation n°3
Brahms : Valse op.39 n°15
Le piano quart de ton
Piano quart de ton d’August Förster
En coopération avec le compositeur et
théoricien tchèque Alois Haba, August Förster construisit la première version
d’un piano à queue à quarts de ton en 1923. Ce piano à queue était composé
de deux mécanismes complets, de construction traditionnelle et à accord
chromatique, empilés l’un sur l’autre, qui étaient accordés à un quart de ton
d’écart.
Un clavier spécial à plusieurs
niveaux permettait de jouer les 170 degrés de l’échelle de cet instrument.
En 1928, August Förster a également
construit un piano droit à quarts de ton pour le compositeur Ivan Wyschnegradsky.
Un peu de vocabulaire et de technique
Les éléments du piano
Piano à
queue
Piano droit
Les éléments de la mécanique
corde
Les cordes sont
: simples et en cuivre dans le grave, doubles et en acier dans le moyen,
triples et en acier (mais plus fines que celles du moyen) dans l’aigu.
étouffoir
Pièce de bois
garnie de feutre qui, lorsque la touche est relâchée, se pose sur la ou les
cordes pour en arrêter la vibration.
barre
d’étouffoir
Pièce garnie de
feutre sur laquelle la tige de l’étouffoir s’appuie lorsque celui-ci quitte
la corde pour qu’elle vibre.
noix
Pièce qui,
poussée par le levier d’échappement, permet de diriger le marteau vers la ou
les cordes.
levier
d’échappement
Tige mobile qui
transmet le mouvement du chevalet à la noix et qui permet au marteau de
revenir en arrière dès qu’il a frappé la ou les cordes.
chevalet
Pièce mobile
transmettant le mouvement au levier d’échappement.
feutre
Tête du marteau
recouverte de feutre, qui frappe la ou les cordes pour les mettre en
vibration.
marteau
Pièce de bois
dont l’extrémité recouverte de feutre (tête) frappe la ou les cordes pour les
mettre en vibration.
barre de
repos des marteaux
Pièce garnie de
feutre sur laquelle le manche du marteau s’appuie lors de sa retombée.
contre-attrape
Pièce qui sert
à retenir le marteau à mi-chemin de sa retombée pour permettre une répétition
de notes plus rapide.
attrape
Tige métallique
dont la tête en bois garnie de feutre amortit le retour de la contre-attrape
pour empêcher le marteau de rebondir en revenant vers l’arrière.
touche
Levier blanc ou
noir basculant sous la pression
des doigts et
provoquant, par l’intermédiaire
d’un mécanisme,
le heurt du marteau sur une ou plusieurs cordes.
Echappement
simple :
Une pièce de bois articulée (bâton d'échappement) pousse le marteau sur la
corde puis bascule, l’obligeant à revenir en arrière tout en lui permettant
aussitôt une nouvelle attaque. Le musicien doit laisser revenir les touches à
leur point de repos avant de les rejouer.
Mécanique à répétition (appelée aussi double échappement) : Le
marteau est arrêté dans sa chute par une attrape alors qu’un système à
ressort permet de remettre en position le bâton d'échappement sous le
marteau. Le musicien peut alors rejouer la touche avant que celle-ci revienne
à sa position de repos, ce qui permet une grande rapidité de jeu.
Le double
échappement est présent sur tous les pianos à queue depuis le début du 20e
siècle. Il n’est pas applicable à la mécanique verticale des pianos droits.
La mécanique du piano à queue, à « double échappement »,
est plus complexe :
Le piano, comment ça marche ? par France Musique :