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I   Chant grégorien - Ars Antiqua

II   Ars Nova

III Les instruments du Moyen-Age


Ars Nova (14e siècle)

 

 

Sommaire de ce chapitre

 

Introduction

La théorie

La notation 

Le développement de la polyphonie

Les nouvelles formes musicales

Philippe de Vitry

Guillaume de Machaut

L’Ars Nova italien
L’Ars subtilior

Quelques œuvres majeures du moyen-âge

 

 

 

Introduction

 

Le terme d’ Ars Nova désigne la musique du 14ème siècle et tient son nom du titre d’un traité musical écrit par le compositeur Philippe de Vitry vers 1320.  C’est par opposition à ce terme d’Ars Nova que l’on a appelé Ars Antiqua la musique du siècle précédent représentée principalement par l’école de Notre-Dame, et les compositeurs Léonin et Pérotin.

 


Enluminure extraite d'un recueil d'œuvres de Guillaume de Machaut, où l'on voit le musicien recevoir la nature qui lui présente le Sentiment, la Rhétorique et la Musique.

Les innovations  de l’Ars Nova concernent essentiellement la notation,  et le développement de la polyphonie qui en découle par de nouvelles règles de composition et l’apparition du style harmonique (c’est à dire de successions d’accords).

 

Les principales figures de l’Ars Nova sont Philippe de Vitry  pour ses travaux de codification,  et  Guillaume de Machaut pour ses œuvres musicales dont la célèbre messe  de Notre-Dame, qui est la première messe polyphonique complète que l’on connaisse, et dont on retrouvera la forme dans de nombreux  chefs-d’œuvre tout au long des siècles suivants.

 

Les  compositeurs prennent plus de libertés par rapport aux contraintes liturgiques, de sorte que,  dans une bulle datée de 1322, le pape Jean XXII d’Avignon  condamne la pratique de l’ars nova à l’église : il lui reproche en particulier ses  rythmes nouveaux et l’utilisation de la langue vulgaire associée au latin dans un même morceau.

 

La notation mesurée ou proportionnelle (ou « système mensuraliste ») de Philippe de Vitry  est également présentée en 1321  par Jean des Murs, mathématicien à la Sorbonne, dans Notitia Artis Musicae.

 

L’ensemble de la théorie musicale du Moyen-âge fut rassemblée par  Jacques de Liège dans  sept  livres intitulés Speculum Musicae  de 1321 à 1324.

 

Dans les années 1370, parut le Codex Ivrea, contenant 81 compositions parmi lesquelles 36 motets dont 9  ont pu être attribués à Philippe de Vitry. C’est le recueil le plus représentatif de l’ars nova  après l’œuvre de Guillaume de Machaut.

 


 

La théorie

 

La notation

 

La notation mesurée, élaborée par Pérotin au siècle précédent, évolue avec le rythme binaire qui apparaît dans le traité « Ars Nova »  de Philippe de Vitry vers  1320. 

 

La famille des notes s’enrichit de deux nouvelles valeurs, la minime et la semi-minime qui divisent la durée de la semi-brève, respectivement par 2 et par 4.

1 semi-brève  = 2 minimes

 

1 minime = 2 semi-minimes

Avec l’introduction de la division binaire par Philippe de Vitry, on voit alors cohabiter  deux  types de division, la division ternaire appelée rapport parfait (héritage de Pythagore, repris par l’église avec la Sainte Trinité )  et la division binaire appelée rapport imparfait.

Philippe de Vitry a essayé de trouver une codification pour distinguer les différentes combinaisons utilisées et a défini un système de quatre divisions de valeurs appelées  « prolations ».  La division ternaire ou binaire d’une note pouvait être indiquée par sa couleur (noire pour ternaire, rouge pour binaire). Chaque prolation est associée à un symbole dont le dernier (C) est encore utilisé pour désigner la mesure à 4 temps.

 


Prolations de Philippe de Vitry

 

 

La notation blanche.

 

Pour des raisons de commodités, on commença à remplacer, vers la fin du 14e siècle, les carrés rouges par des carrés creux, ce que l’on nomma la notation blanche.  Au 15ème siècle, avec  l’invention de l’imprimerie, la forme des notes évolue pour devenir la notation ovale que nous connaissons aujourd’hui. Parallèlement, les valeurs les plus longues (maxime, longue et brève) disparaissent, et des valeurs plus courtes (fusa et semi-fusa) apparaissent.

 

 

 

 

Le développement de la polyphonie

 

Les intervalles de tierce et de sixte qui étaient considérés jusqu’alors  comme dissonants, et donc prohibés (cf Ars Antiqua), sont de plus en plus utilisés.

 

On utilise aussi de plus en plus souvent les altérations, permettant des innovations sur le plan mélodique, mais aussi  harmonique. La notion de tonalités majeure et mineure se développe par l’utilisation croissante de la sensible (note qui est un demi-ton au-dessous de la tonale)

Ainsi l’apparition du do# et du sol#, qui sont les notes sensibles de ré et de la,  permettent à Guillaume de Machaut d’utiliser la cadence (suite d’accord conclusive) suivante :

On entre ainsi dans la voie de l’écriture verticale, base de l’harmonie.

 

 

 

Les nouvelles formes musicales

 

Dans la forme, le motet évolue  vers des œuvres plus ambitieuses, avec des textes  traitant de la vie religieuse ou politique du siècle.  

Au niveau du rythme,  le hoquet est de plus en plus pratiqué. Il s’agit d’interruption par des silences dans les différentes voix, qui donnent à la mélodie un  aspect heurté,  rappelant la musique syncopée d’aujourd’hui.

 

Le motet isorythmique

 

Les nouvelles méthodes de notation de l’ars nova permettent de visualiser des rythmes  de plus en plus élaborés, ce que l’on trouve dans le motet isorythmique, qui est la forme la plus caractéristique de cette époque.

 

Mais qu’est-ce que l’isorythmie ?

C’est une méthode de composition qui combine une séquence rythmique avec une séquence mélodique,  ces 2 séquences étant généralement de durées différentes. C’est une approche très mathématique, qui peut donner lieu à des compositions très complexes, et qui rappelle par cela,  la démarche de certains de nos compositeurs contemporains.

 

Prenons un exemple :

Soit un thème rythmique (appelé  talea) de 5 durées :

 

 

Et un thème mélodique (appelé color) de 6 notes :

 

Si l’on superpose les deux, on voit qu’il faut répéter 6 fois le thème rythmique en même temps que 5 fois le thème mélodique (soit 30 notes) pour qu’ils se terminent en même  temps (le PPCM de 5 et de 6 étant 6x5=30 : C’est effectivement très mathématique).

C’est ce que l’on a fait sur la partition ci-dessous, où l’on a repéré en vert les séquences  rythmiques et en rouge les séquences mélodiques.

 

 

Quand on sait que l’on peut appliquer cette méthode aux différentes voix,  les voix hautes étant plus vives que les voix basses  écrites en valeurs plus longues,  on voit que l’on peut atteindre des niveaux de complexité élevés.

 

On trouve ces formes isorythmiques en particulier dans certains passages de la messe de Guillaume de Machaut, dont il est question plus loin.

 

 

La messe polyphonique

 

La plus grande innovation dans la forme est sans aucun doute l’invention de la messe comme genre musical.

 

La plus ancienne messe polyphonique complète qui nous soit parvenue est extraite d'un recueil anonyme, connu sous le nom de Messe de Tournai. C’est une œuvre hétérogène, , qui rassemble des pièces, probablement de plusieurs compositeurs, datant de 1330 à 1340 environ.

 

Mais c’est la messe de Notre-Dame de Guillaume de Machaut, écrite en 1364,  qui apparaît comme le premier véritable chef-d’œuvre de ce nouveau genre musical, genre qui fera l’objet de nombreux autres chefs-d’œuvre par d’autres compositeurs tout au long des siècles suivants.

 

Philippe de Vitry (1291-1361)

 

Philippe de Vitry, évêque de Meaux,  était connu de ses contemporains comme un savant, un poète et un musicien.


Miniature tirée du « Roman de Fauvel », original du 15e siècle conservé à la Bibliothèque nationale de France.

On le connait peu comme compositeur mais très bien comme théoricien car il nous a laissé des traités de musique dont le plus important, l’ Ars Nova,  a donné son nom au mouvement musical de cette époque.

 

Ses œuvres musicales

Peu d’œuvres musicales de Philippe de Vitry nous sont parvenues.  On note néanmoins sa participation au Roman de Fauvel, dont la réalisation est due au concours de plusieurs auteurs et compositeurs.

 En voici un extrait:

 

Le roman de Fauvel est un pamphlet très provoquant s’attaquant aux rois Philippe IV et Philippe V ainsi qu’à la cour du pape en Avignon. Il raconte  les exploits d’un âne fauve, symbole de tromperie et de vilénie.

    L’extrait suivant, que je vous propose d’écouter a été composé par Philippe de Vitry. C’est un motet utilisant la technique de l’ isorythmie :

 


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Extrait du Roman de Fauvel :
de Philippe de Vitry
Par le clemencic consort– Harmonia Mundi

 

 

 

 

Guillaume de Machaut (1300 environ-1377)

 

Guillaume de Machaut est la grande figure de l’Ars Nova . Il  met en pratique de façon magistrale les nouvelles théories codifiées par Philippe de Vitry, dans de nombreuses compositions profanes et sacrées telles que lais, ballades, rondeaux, virelais, motets,  et surtout la célèbre messe de Notre-Dame.


Les lais : poèmes narratifs très courts, à une ou deux voix, parfois accompagnés par des instruments.

Les ballades : à 2, 3 ou 4 voix, formées de trois strophes égales et d’un couplet plus court appelé envoi.

Les rondeaux :  à 2, 3 ou 4 voix, petits poèmes de treize vers avec répétition obligée.

Les virelais : à une ou deux voix,  soutenus par un instrument de musique (Harpe ou vielle)

Les motets : dans leur nouvelle forme, isorythmique.

 


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Voici un extrait d’une des 42 ballades écrites par Guillaume de Machaut :

 

(à 3 voix)

 

Par l’ensemble Organum, dir. Marcel Pérès – Harmonia Mundi.

 

 

Mais surtout, Guillaume de Machaut invente un nouveau genre musical qui va être développé magnifiquement par les musiciens des siècles suivants, qui est la messe à plusieurs voix. Sa messe de Notre-Dame n’est pas seulement un des chefs-d’œuvre de la musique médiévale, c’est aussi un sommet de l’histoire de la musique..

 


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La messe de Notre Dame a été écrite en 1364, semble-t-il à l’occasion du sacre de Charles V.

Elle comporte  6  parties polyphoniques à 4 voix:

Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus, Agnus Dei, Ite missa est.

D’autres séquences chantées dans le style grégorien complètent la messe.

 

En voici un extrait :

Par l’ensemble Organum, dir. Marcel Pérès – Harmonia Mundi.


(Voir aussi la fiche compositeur consacrée à Guillaume de Machaut)

 

 

 

L’ars nova italien

 

La musique italienne du moyen-âge fait déjà apparaître une nette préférence des italiens pour l’art vocal.

Alors que la teneur en bas sert de trame à la polyphonie française, en Italie c'est la mélodie supérieure, la voix du haut, qui va être primordiale.

 

Vers 1319,  Marchetto de Padoue  expose dans son Pomerium in arte musice mensurate les principes qui vont régir l’ars nova italien du Trecento (14e siècle italien), qui rayonnera tout particulièrement à Florence.

 

Le plus célèbre compositeur des débuts de l’art nova en Italie est Jacopo da Bologna ( ? - ~1355),  qui fut l’un des tous premiers polyphonistes italiens.

 

Mais c’est son élève Francisco Landini (1325-1397) , organiste aveugle,  qui fut le plus représentatif de l’Ars nova italien. 

Bien que ses ballades soient différentes dans la forme,  elles subissent l’influence de Guillaume de Machaut.

 


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Voici un extrait d’une des 140 ballata (ballades) écrite par Francisco Landini :

 

(à 3 voix)

 

Par l’ensemble Organum, dir. Marcel Pérès – Harmonia Mundi.

 

Enfin,  c’est un musicien liégeois Johannes Ciconia (1340 env.-1411) qui, après avoir résidé en Avignon,  s’installa à Padoue et domina la fin de l’ars nova italien.

 

 

 

L’ars subtilior

 

L'ars subtilior désigne la période qui s'étend entre la mort de Guillaume de Machaut (1377) et les premières œuvres de G.Dufay, soit entre l'Ars nova et le début de la Renaissance.
L'ars subtilior reprend les mêmes formes que l'ars nova (ballades, madrigaux, rondeaux, virelais, motets isorythmiques), en les rendant encore plus complexes sur les plans rythmique et polyphonique.
Les partitions avaient parfois elles-mêmes des formes inhabituelles et expressives, comme par exemple cette partition en forme de coeur de Baude Cordier, compositeur de référence de ce mouvement.
L'esthétique de cette époque, au manièrisme gratuit et extravagant, arrive à un point de rupture dans l'histoire de la musique et seul le retour salutaire vers la simplicité à la Renaissance donnera un nouveau souffle à la musique.

 

 

 

Quelques œuvres majeures du moyen-âge

Chant grégorien

par les moines de l'Abbaye de Solesmes

Hildegarde von Bingen

Symphonia armonie celestium revelationum

Léonin

Messe du jour de Noël

Pérotin

Viderunt omnes

Adam de la Halle

Le jeu de Robin et Marion

Philippe de Vitry + divers

Le roman de Fauvel

Guillaume de Machaut

La Messe de Nostre Dame

 

 

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