Le post-romantisme en Russie
Sommaire de ce chapitre
Introduction
La fin du 19e siècle est marquée par des mouvements
nationalistes qui s’étendent en Europe. Les compositeurs, même s’ils ne sont
pas des nationalistes actifs, expriment par leur musique les aspirations et la
spécificité des peuples. C’est particulièrement le cas pour les peuples
d’Europe centrale tels que les tchèques et les hongrois qui revendiquent leur
autonomie ou leur indépendance, et pour la Russie alors très influencée par la
musique occidentale.
L’orientation nationale de la musique
russe apparait avec Glinka suivi par le groupe des cinq composé de Balakirev,
Cui, Moussorgski, Rimski-Korsakov et Borodine.
Tchaïkovski, puis Glazounov et
Rachmaninov, s’inspirent de l’identité nationale tout en continuant la
tradition romantique.
Scriabine, étranger aux instances de la
musique nationale russe, poursuit l’œuvre de Chopin et de Liszt en y ajoutant
une dimension philosophique et mystique.
Glinka (1804-1857)
Glinka est considéré comme le
fondateur de l’école russe. Comme nous l’avons vu dans le chapitre qui lui
est consacré dans le cadre de l’opéra
romantique, ses opéras eurent une forte influence sur l’opéra russe
ultérieur.
Ami des poètes Pouchkine et Gogol,
ceux-ci l’incitèrent à mettre son art au service d’un style national, mettant
en avant la musique populaire de son pays.
Outre ses opéras, Glinka a écrit de
la musique de chambre et de la musique symphonique, influencées par ses
nombreux voyages en Europe et tout particulièrement en Espagne. Plusieurs de
ses œuvres symphoniques sont en effet basées sur le folklore espagnol, telles
que "La jota aragonaise" ou "Une nuit d'été à Madrid".
Glinka encouragea la vocation musicale de
Balakirev qui créera plus tard le Groupe des Cinq.
Retrouvez Glinka dans le chapitre
consacré à l’opéra
russe et une biographie et le catalogue de ses œuvres sur musicologie.
Les principales œuvres de Glinka :
Le groupe des 5
Le groupe des 5
autour du critique d’art, Vladimir Stasov, assis au centre, de profil. .
De gauche à droite : Moussorgski, Rimsky-Korsakov, Balakirev, Cui et Borodine.
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Le groupe des cinq a été fondé par Mili
Balakirev qui a réuni autour de lui Nikolaï Rimski-Korsakov, Alexandre
Borodine, Modeste Moussorgski et César Cui.
Ils voulaient créer une musique
nationale russe en optant pour les genres les plus expressifs : l'opéra, le ballet,
et la musique symphonique.
Mili Balakirev (1837-1910) n’est
pas le compositeur du groupe le plus productif. Il est surtout
connu pour sa pièce très virtuose pour piano « Islamey »
et son poème symphonique « Tamara ».
César Cui (1835-1918) a composé
une dizaine d’opéras et est surtout connu pour ses nombreuses critiques
musicales. C’est lui qui rédigea le manifeste du groupe des cinq.
Le manifeste rédigé par César Cui :
1. La nouvelle
école veut que la musique dramatique ait une valeur propre de musique absolue,
indépendamment du texte qu'elle accompagne. Un des traits caractéristiques de
cette école est de s'insurger contre la vulgarité et la banalité.
2. La musique
vocale, au théâtre, doit se trouver en parfait accord avec la signification du
texte chanté.
3. Les formes de
la musique lyrique ne sont nullement déterminées par les moules traditionnels
de la routine : elles doivent naître librement, spontanément, de la situation
dramatique et des exigences particulières du texte.
4. Il est
essentiel, fondamental, de traduire musicalement et avec un maximum de relief
le caractère et le type des divers personnages. Ne jamais commettre
d'anachronisme dans les œuvres de caractère historique. Restituer fidèlement la
couleur locale.
Mais le groupe des cinq est surtout connu pour ses 3 grands compositeurs que sont Borodine,
Moussorgski et Rimski-Korsakov.
Œuvres pour piano du groupe des cinq :
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Borodine (1833-1887)
Fils naturel du prince géorgien Louka
Guédianov, Alexandre Borodine apprend en autodidacte la flûte, le piano et le
violoncelle, mais suit également des études de médecine et de chimie. Il
perfectionne ses connaissances en chimie auprès de Mendeleïev, puis est
engagé à l’hôpital de l’armée territoriale. C’est là qu’il fait la
connaissance de Moussorgski alors en soin à l’hôpital.
En 1858, il obtient son doctorat de
médecine. Se consacrant à la médecine et à la chimie, il réserve son temps
libre à la composition.
Il rencontre à nouveau Moussorgski en
1859, qui le fait rencontrer Balakirev.
En 1861, il rencontre sa femme, Ekaterina
Protopopov, pianiste talentueuse qui lui fera découvrir Schumann, Chopin,
Liszt et Wagner.
Sans interrompre sa carrière
scientifique, il participe à la fondation du groupe des cinq en 1862.
L’excès de travail dû à ses multiples
activités vint à bout de sa santé fragile et il mourut subitement lors d’un bal
costumé en 1887.
L'essentiel
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Borodine est surtout connu pour son
opéra inachevé « Le
prince Igor », commencé en 1869 et terminé après sa mort en 1890 par Glazounov
et Rimski-Korsakov. Les « Danses
polovtsiennes » qui en font partie est l’une de ses œuvres les
plus jouées, ainsi que son poème symphonique « Dans
les steppes de l’Asie centrale », composé pour célébrer les 25 ans
de règne d’Alexandre III, et dédié à Liszt.
Ses autres principales œuvres
sont ses symphonies
n°1 et n°2 « épique » et le quatuor
no 2 en ré majeur.
Voir aussi une biographie sur la Musicologie.org.
Moussorgski (1839-1881)
Modeste Moussorgski est né le 21 mars
1839 à Karevo.
En 1852, il entre à
l'École militaire, dont il sort lieutenant en 1856.
En 1857, il subit une première crise d'épilepsie due à son alcoolisme.
Cette année là, il
fait la connaissance de César Cui et de Balakirev dont il devient l’élève.
Sous l’influence de ce dernier, il quitte l'armée en 1859 pour se consacrer
entièrement à la musique.
En 1861, il participe à la création
du groupe des 5.
Cette même année, l'abolition du servage par Alexandre II provoque
la ruine de sa famille, petits propriétaires terriens, et le
prive de ressources financières. Dès 1863, il doit travailler en tant
qu’employé administratif pour gagner sa vie.
Il se partage désormais entre des
tâches administratives le jour, et la composition la nuit.
Confronté à l'insuccès que connaissent
ses œuvres et à une situation matérielle difficile, il se réfugie dans
l'alcoolisme, qu'il avait déjà connu pendant ses trois ans d'armée.
En 1866, à la recherche d’un langage
nouveau, Moussorgski se détourne de Balakirev et se rapproche de
Rimski-Korsakov. Sous l’influence de celui-ci, il compose en 1867
que l’on trouve dans 2 versions : La version
originale, plus slave et plus authentique et une version
révisée par Rimski-Korsakov.
En 1869, son chef-d’œuvre, l’opéra « Boris Godounov », voit
le jour mais déplait à la critique qui lui reproche son sujet sulfureux ainsi
que l’absence de ballet et de personnage féminin. Une nouvelle version est
écrite en 1872 et créée avec succès en 1874. L’orchestration en sera reprise
par Rimski-Korsakov après la mort de Moussorgski. Les
versions des deux compositeurs coexistent de nos jours.
Après la mort de son
ami peintre Viktor Hartmann en 1873, et une exposition qui lui est consacrée
l’année suivante, Moussorgski compose les
, suite pour piano illustrant 10 tableaux du peintre. Cette
œuvre, d’abord arrangée par Rimski-Korsakov, sera orchestrée par Ravel en 1922.
Moussorgski laisse plusieurs opéras
inachevés dont « Salammbô » et deux autres opéras qui seront achevés par
d’autres : « La Khovanchtchina », terminé par Rimski-Korsakov, puis dans une
autre version par Chostakovitch en 1960, et « La Foire de Sorotchinsky »,
terminé par Tcherepnine.
Moussorgski a inspiré de nombreux
compositeurs du 20e siècle, et en particulier Debussy
Moussorgski meurt à 42 ans le 28 mars
1881 à Saint-Pétersbourg.
On trouvera une biographie plus
complète sur Encyclopédie
Larousse.
Les plus belles œuvres de Moussorgski :
Rimski-Korsakov (1844-1908)
Nikolaï Rimski-Korsakov est né le 18
mars 1844 à Tikhvine (empire russe). Issu d’une famille aristocratique, il
entreprend une carrière dans la Marine, mais étudie à l’insu de sa famille
le piano et la composition.
Alors qu’il est encore officier dans
la marine, il rencontre en 1861 le pianiste Mili Balakirev, fondateur du
groupe des cinq, qui l'encourage à composer. Il commence en 1862 l’écriture
de sa première symphonie qui sera jouée en public pour la première fois en
1865.
En 1868, il rencontre une première fois
Tchaïkovski. Professeur au Conservatoire de Saint-Pétersbourg à partir de
1871, il a pour élèves Glazounov, Prokofiev et Stravinski.
En 1872 il épouse Nadejda Purgold,
femme musicienne qui sera pour lui une alliée et une conseillère comme le fut
Clara Wieck pour Robert Schumann.
En 1873, toujours officier de marine,
il est nommé Inspecteur des orchestres de la marine impériale, et devient ainsi
un musicien à part entière.
En 1884, son poste d’inspecteur étant
supprimé, il quitte la marine et devient adjoint de Balakirev, alors directeur
de la Chapelle du Palais impérial.
De 1883 à 1886, il orchestre les œuvres
de Moussorgski et termine « Le Prince Igor » de Borodine.
C’est après 1886 qu’il compose ses plus
belles œuvres, telles que
,
et « la Grande Pâque russe ».
Stravinski et Rimski-Korsakov
|
La mort de Tchaïkovski en 1893, lui
donne la possibilité de composer pour le Théâtre impérial. Il écrira onze
opéras de 1893 à 1908.
En 1907, il dirige à Paris 5 concerts
historiques russes organisés par Sergueï Diaghilev.
Il décède le 21 juin 1908 d’un
infarctus à l’âge de 64 ans.
Nikolaï Rimski-Korsakov, très
inspiré par Berlioz, fut un grand orchestrateur. Il est l’auteur de deux traités
d’orchestration dont le second fut achevé après sa mort par son beau-fils
en 1912.
Il reste le membre le plus influent
et le plus connu du groupe des cinq dont il orchestra plusieurs œuvres
d'autres membres après leur mort.
Il influença également la musique
orchestrale de Ravel, Debussy, Dukas, et Respighi, ainsi que les premiers
ballets de Stravinski. Ce dernier écrira un Chant funèbre à la mort de son
maître.
Les plus belles œuvres de Rimski-Korsakov :
Rimski-Korsakov a également écrit 3 symphonies et un concerto pour
piano.
Tchaïkovski (1840 -1893)
Piotr Ilitch Tchaïkovski est né le 7
mai 1840 à Votkinsk en Russie dans une famille ne faisant pas de musique.
Il commence le piano dès l’âge de
5 ans. Il est soutenu par sa mère dans sa passion pour la musique mais doit
s’affronter à son père qui le destine à l’étude du droit.
En 1852, il entre à l'école de droit
à Saint-Pétersbourg. A la fin de ses études, en 1859, il obtient un poste de
secrétaire au ministère de la justice.
Il démissionne du ministère en 1863, et
s'inscrit au Conservatoire de Saint-Pétersbourg qui a ouvert depuis un an
sous la direction d'Anton Rubinstein. Il connait alors une situation
matérielle difficile et commence à gagner sa vie en donnant des leçons.
Il sort du conservatoire en décembre
1865, avec une médaille d’argent pour sa cantate sur l’Hymne à la joie de
Schiller.
En 1866, il est nommé professeur
d’harmonie au conservatoire de Moscou que Nikolaï Rubinstein, le frère d'Anton,
vient de fonder, et où il
aura l'honneur en 1867, d'accueillir Berlioz, auquel il voue une immense
admiration. Il y restera jusqu’en 1876.
C’est là qu’il compose ses 3 premières
symphonies (1866, 1872, 1875) qui le rendent célèbre.
En 1868, Tchaïkovski rencontre à
Saint-Pétersbourg les musiciens du «Groupe des cinq» qui l’accueillent favorablement
en tant que compositeur de musique russe, mais lui reprochent ses influences
occidentales.
En 1874, il compose son
, qu’il dédicace à Nikolaï Rubinstein, qui déclarera cette pièce
"si mauvaise qu’elle lui donne la nausée!". Tchaïkovski supprima alors
la dédicace et l’envoya à Hans
von Bülow qui en fit un triomphe. Nikolaï Rubinstein présenta plus tard ses
excuses et mit le concerto à son répertoire.
En 1875, à Paris, Tchaïkovski
rencontre Liszt, Bizet, Saint-Saëns et Massenet.
En 1876, il a une relation épistolaire
avec une riche admiratrice, Nadejda von Meck, qui lui verse, jusqu’en 1890,
une rente qu’il consacre entièrement à son art, et à qui il dédie sa 4e
symphonie.
Le Lac des Cygnes » par
le Bolchoï de Minsk.
|
En 1877, pour faire taire les ragots concernant
son homosexualité, il épouse une de ses anciennes élèves, mais ce mariage est
un échec : En pleine dépression, il tente de se suicider en plongeant dans
la Moskova. Il se sépare de sa femme peu après.
Cette même année, la création du
est un échec. Il faudra attendre la reprise de la chorégraphie
par Marius Petipa 18 ans plus tard pour que ce ballet trouve le succès qu’il
mérite. Le Lac des Cygnes est aujourd’hui le ballet le plus joué au
monde, même plus d’un siècle après sa création !
C’est après avoir entendu la Symphonie
espagnole d’Édouard
Lalo en mars 1878, qu’il décide de composer l’une de ses œuvres les plus
célèbres, son
.
En 1885, Il est élu au poste de
directeur de la Société musicale russe.
La Société Musicale
Russe
La Société Musicale Russe a été
fondée le 1er mai 1859 à Saint-Pétersbourg par Anton Rubinstein sous
le patronage de la grande-duchesse Elena Pavlovna. Elle avait pour but de
favoriser l’extension de l’enseignement musical et d’encourager les activités
des musiciens russes.
A Saint-Pétersbourg la Société
organise des concerts symphoniques et crée une école qui deviendra le
conservatoire, inauguré officiellement le 8 septembre 1862 et dirigé par Anton
Rubinstein.
La filiale de Moscou est créée
quant à elle en 1860, sous la direction de Nikolaï Rubinstein, le frère
d’Anton, qui inaugure le conservatoire de Moscou en 1866.
En 1868, la duchesse Hélène et les
autres mécènes ne suffisant plus à soutenir financièrement la société, celle-ci
est prise en charge par la famille impériale et devient alors la « Société
Impériale Russe de Musique».
Au cours des années suivantes, la
Société s’installe dans de nombreuses autres villes de Russie. Au début du XXe
siècle, elle comprenait une cinquantaine de filiales organisant des concerts et
disposant d’un conservatoire.
La Société Musicale Russe cessa
d’exister après la révolution de 1917. En 1923, des musiciens russes émigrés
fondèrent le « Conservatoire Russe de Paris » afin de maintenir les
traditions de la culture musicale russe et son enseignement.
En 1888, Tchaïkovski entreprend une tournée
européenne en tant que chef d'orchestre et compositeur.
En 1889, le danseur et chorégraphe
français, Marius Petipa, qui dirige les théâtres impériaux à Saint-Pétersbourg,
lui commande un nouveau ballet avec comme argument « La Belle au Bois
Dormant » de Charles Perrault.
En 1891, il fait une tournée de
concerts triomphale aux États-Unis. Il participe à l'inauguration du Carnegie
Hall à New York en y dirigeant ses œuvres. La même année, Marius Petipa lui
commande un autre ballet,
d'après un conte
d'Hoffmann, dans lequel il introduit un célesta, instrument tout récemment inventé (1886). En 1893 il compose sa Sixième Symphonie baptisée par la suite
« Symphonie pathétique », à cause de son final « adagio
lamentoso » très particulier. Il estimait qu’il s’agissait de sa
meilleure œuvre.
Tchaïkovski meurt peu après, le 6
novembre 1893, à Saint-Pétersbourg. Sa popularité est alors telle que son décès
donne lieu à des funérailles nationales dont les frais sont pris en charges par
la maison impériale.
Tchaïkovski est considéré comme le
plus grand symphoniste russe de sa génération. Toutes ses œuvres lyriques s'inspirent
de l'identité nationale. Il concilie sensibilité russe et écriture romantique
occidentale.
Les principales œuvres de Tchaïkovski :
On trouvera la liste complète des œuvres de Tchaïkovski sur musiqueorguequebec.ca
Scriabine (1872 – 1915)
Scriabine est un compositeur difficile à classer dans
cette histoire de la musique.
En effet, compositeur russe, contrairement à ses
contemporains, il refuse toute référence au folklore national. D’abord dans
la lignée de Chopin et de Liszt, on peut l’associer au post-romantisme de la
fin du 19e siècle, mais durant les 12 dernières années de sa vie,
sa musique évolue vers un tel modernisme qu’on peut le considérer comme un
pionnier de la musique du 20e siècle.
Alexandre Scriabine nait à Moscou le 6
janvier 1872. Il perd sa mère à l’âge de 1 an et est élevé par une tante et
une grand’mère, qui lui font découvrir le piano pour lequel il montre des
dons précoces.
A 9 ans, il est présenté à Anton
Rubinstein qui lui prédit un grand avenir de pianiste.
En 1883, il entre au corps des Cadets de
l’École militaire de Moscou où il prend des cours de piano et peut, par
faveur spéciale, faire plusieurs heures de piano par jour au lieu de faire
des exercices militaires.
En 1888 il entre au conservatoire de
Moscou où il rencontre Rachmaninov qui sera à la fois un ami et un rival.
En 1892, il obtient le premier prix de
piano au conservatoire de Moscou, et publie ses premières œuvres. Il commence
alors une carrière de pianiste et voyage dans toute l’Europe. Mais un jour,
alors qu’il interprète un morceau de Liszt, il se blesse à la main droite, ce
qui remet en question sa carrière de virtuose et le décide à choisir
définitivement la voie de la composition. Il retrouvera plus tard ses
capacités de pianiste mais n’interprètera alors plus que ses propres
compositions.
En 1896 il fait la connaissance de
Michail Morozov et de sa femme Margarita Morozova. Celle-ci le lance dans les
salons de Moscou et devient son riche mécène.
En 1897, il épouse Vera Ivanovna Issakovitch,
brillante pianiste du Conservatoire de Moscou, qu’il quittera en 1905, pour
Tatiana de Schloezer.
En 1898, il obtient le poste de
professeur de piano au Conservatoire de Moscou.
Il se passionne pour la philosophie et
devient membre de la société de philosophie moscovite, dont Margarita Morozova
est une co-fondatrice, et se plonge dans la lecture des philosophes antiques.
En février 1906, il s’installe près de
Genève où il rencontre le sculpteur Auguste de Niederhausen, adepte de la
théosophie fondée par Helena Petrovna Blavatski. La théosophie, dont
« la doctrine secrète » publiée en 1888 par Helena Blavatski est
l’ouvrage fondateur, repose sur un syncrétisme des différentes religions,
philosophies et sciences, et plus particulièrement le bouddhisme et
l'hindouisme. Le théosophe croit en la réincarnation, et en l’existence de
supérieurs inconnus (maitres de sagesse) veillant sur l’humanité.
Ces idées présideront à la réalisation
du « poème de l’extase » pour grand orchestre dont l’écriture
s’échelonne de 1904 à 1907, résumant les préoccupations musicales et
philosophiques du compositeur.
Sons et couleurs selon Scriabine.
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En 1907 il séjourne à Paris où il
donne de nombreux concerts organisés par Diaghilev.
De 1908 à 1910, il séjourne à
Bruxelles où il fréquente les cercles ésotériques et théosophiques.
C’est de cette période que date
« Prométhée ou le poème du feu », œuvre dans laquelle il met en
relations sons et couleurs.
Scriabine faisait en effet un
parallèle entre la musique et les couleurs. Il inventa à cet effet un
appareil qui reproduisait les sons sous forme de couleurs. « Prométhée »
comportait ainsi une partie pour « clavier à lumières », projetant
diverses couleurs pendant que l’orchestre jouait.
En 1910, Scriabine retourne à Moscou,
où il s’installe définitivement. Il travaille
alors à une œuvre monumentale pour 2000 musiciens combinant les effets de la musique
avec ceux de la danse, du chant, de la couleur et du parfum, et pour la
réalisation de laquelle il avait décidé de faire bâtir un temple en Inde. Scriabine
cherche en effet à donner une dimension spirituelle et métaphysique à son
œuvre. Pour lui, tout est vibration, et une œuvre d'art doit être la plus
totale possible, faisant appel autant à l'ouïe qu'à la vision, au toucher, à
l'odorat.
Il meurt le 27 avril 1915 à 43 ans, sans
avoir eu le temps d’écrire son « Mystère », dont seuls subsistent le
texte poétique et des esquisses musicales de l' « Acte
Préalable » qui devait servir de « rituel préparatoire ».
Plus tard, Alexande Nemtin (1936 - 1999), adepte de Scriabine, passera vingt-huit ans de sa vie à
parachever l' « Acte préalable », publiant la première partie
(univers) en 1972, la seconde partie (humanité) en 1980 et terminant la troisième
partie (transfiguration) en 1996 sous le titre « Preparation
to the Final Mystery ». L’œuvre, d’une durée de près de 3 heures, a
été enregistrée par Vladimir Ashkenazy et l’orchestre symphonique de la radio
de Berlin.
Les principales œuvres de Scriabine :
On trouvera la liste des œuvres de Scriabine
sur Wikipédia,
dans laquelle on distinguera une première période correspondant aux opus 1 à 29,
très influencée par Chopin et, après 1903 et surtout après 1910, une période résolument
plus moderne.
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Deux compositeurs romantiques tardifs
Glazounov (1865-1936)
Alexandre Glazounov est né à
Saint-Pétersbourg le 10 août 1865.
Il commence à étudier avec Rimski-Korsakov à l’âge de 15 ans et
termine à 16 ans sa 1ère Symphonie qui sera dirigée par Mili
Balakirev le 22 août 1882.
Sous l'influence de Rimski-Korsakov,
il écrit d'abord des poèmes symphoniques d'inspiration russe, dont son plus
célèbre « Stenka Razine » (1885) qu’il dédie à la mémoire de Borodine.
Pendant les années 1890, Glazounov
compose quelques-unes de ses plus belles œuvres dont les 4e, 5e,
6e symphonies et le ballet « Raymonda » (1897).
En 1899, Glazounov devient professeur
de composition et d’orchestration au Conservatoire de Saint-Pétersbourg puis, en
1905, directeur de ce même conservatoire.
Émigré en 1928, Glazounov s'installe à
Paris et effectue des tournées en Europe et aux États-Unis.
Il meurt à Neuilly-sur-Seine le 21
mars 1936.
Les œuvres les plus célèbres de Glazounov :
On trouvera ici la liste complète des œuvres de Glazounov : Wikipedia
Rachmaninov (1873-1943)
Sergueï Rachmaninov est né le 1er
avril 1873 à Semionovo, près de Novgorod.
Il entre à neuf ans au conservatoire
de Saint-Pétersbourg puis à douze ans au conservatoire de Moscou où il compte
parmi ses professeurs Anton Arenski et Serge Taneïev.
En 1892, il obtient un prix de composition
pour son opéra « Aleko » (en 1 acte), créé au théâtre Bolchoï. Il entame alors
une carrière de pianiste virtuose qui le fera reconnaître comme l'un des plus
grands pianistes de son temps.
La même année, encouragé par
Tchaïkovski, il commence sa carrière de compositeur.
En 1897, l’échec de sa première
symphonie le plonge dans une dépression qui va durer 3 à 4 ans, jusqu’à ce que,
après avoir suivi un traitement de psychothérapie, il compose en 1901 son
, qui reste son œuvre la plus populaire.
C’est de 1901 à 1917 qu’il écrit la
plus grande partie de son œuvre.
De 1904 à 1906, il dirige les
représentations du théâtre du Bolchoï.
En 1909, il fait une première tournée
aux Etats-Unis, où il remporte un grand succès.
De 1911 à 1913, il dirige l’orchestre
philharmonique de Moscou.
En 1917, la Révolution russe décide
Rachmaninov à quitter définitivement la Russie.
Il mène alors une carrière de
pianiste virtuose, vivant alternativement en Suisse et aux États-Unis. Il
continue néanmoins à composer, puisque 1934 verra la création de la
et 1936 celle de sa 3e Symphonie.
Pendant la seconde guerre mondiale, il
se réfugie en Suisse, puis en Californie où il meurt d’un cancer du poumon le 28
mars 1943.
L’œuvre de Rachmaninov, influencée par
Tchaïkovski, reste attachée à la tradition romantique, faisant de lui le
dernier compositeur romantique du 20e siècle.
Elle n’est pas seulement consacrée au
piano avec 4 concertos, 2 sonates, des préludes et autres pièces, mais
comprend également 3 symphonies, des poèmes symphoniques, des œuvres
religieuses et de la musique de chambre.
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Les plus belles œuvres de Rachmaninov :
Musique symphonique :
L’Ile
des morts, poème symphonique, op. 29 (1909)
Symphonie
n° 3, op.44 (1936)
Danses
symphoniques, op.45 (1940)
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Musique concertante :
Concerto
pour piano n° 2, op.18 (1900)
Concerto
pour piano n°3, op.30 (1909)
Rhapsodie
sur un thème de Paganini, op.43 (1934)
|
Musique pour piano seul :
24 préludes dont :
Prélude
en do dièse mineur, op.3 n°2 (1892)
Dix
préludes, op.23 (1903)
Treize
préludes, op.32 (1910)
17 Etudes-Tableaux dont :
Huit
Etudes-Tableaux, op.33 (1911)
Neuf
Études-Tableaux, op.39 (1917)
Sonate
pour piano no 1, op.28 (1908)
Sonate pour piano no 2, op.36 (1913,
1931)
Variations
sur un thème de Corelli, op.42 (1931)
|
Musique religieuse :
Liturgie
de saint Jean Chrysostome op.31 (1910)
Les
vêpres op.37 (1915)
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On trouvera le catalogue complet des œuvres de Rachmaninov sur Wikipedia.
Autres
compositeurs russes post-romantiques
DARGOMYJSKI (1813-1869)
Alexandre Dargomyjski est né le 2
février 1813 à Toula.
Autodidacte, il profita des conseils
de Glinka qui le décida à se consacrer à la musique.
Il entra en rapport étroit avec le
groupe des cinq qui le considérèrent comme leur parrain, Glinka étant leur père
spirituel. Comme eux, il s’employa à créer une école musicale russe en
s’écartant des normes occidentales.
Son œuvre principale est l’opéra « Rusalka ».
Son 2e opéra, « Le
convive de marbre », a été achevé par Nicolaï Rimski-Korsakov.
Alexandre Dargomyjski est mort le 17
janvier 1869 à Saint-Pétersbourg
ARENSKI (1861-1906)
Anton Arenski est né à Novgorod en
Russie le 12 juillet 1861.
Elève de Rimski-Korsakov au conservatoire
de Saint-Pétersbourg, il est diplômé en 1882. Il est alors nommé professeur au
Conservatoire de Moscou où il a pour élèves Alexandre Scriabine et Serge
Rachmaninov.
Il retourne à Saint-Pétersbourg en 1895
pour diriger la Chapelle impériale jusqu’en 1901.
Influencé par Tchaïkovski et Wagner, il
a composé deux symphonies,
un concerto
pour piano et un concerto
pour violon, ainsi que de la musique de chambre.
Il meurt à Terioki en Finlande le 25
février 1906.
LIADOV (1855-1914)
Anatoli Liadov est né le 11 mai 1855 à
Saint-Pétersbourg.
Il est élève de Rimski-Korsakov au
conservatoire de Saint-Pétersbourg, où il sera lui-même professeur de 1878 à
sa mort. Il y a pour élèves entre autres Prokofiev et Miaskovski.
Il se consacre, avec Mili Balakirev et
Sergueï Liapounov, à la collection de chants populaires russes. Comme
Rimski-Korsakov, sa musique s’inspire beaucoup des contes russes. Ses
principales œuvres sont « Huit
chants populaires russes », des poèmes symphoniques tels que « Baba-Yaga »
(1904), « Le
lac enchanté » (1909), « Kikimora »
(1910), « Fragment
de l’Apocalypse » (1912), des œuvres pour piano inspirées de Chopin
telles que des préludes,
des mazurkas
etc …
Liadov est quelquefois considéré comme
« un sixième membre du groupe des Cinq ».
Il meurt le 28 août 1914 à Novgorod.
LIAPOUNOV
(1859-1924)
Sergueï Liapounov est né le 30 novembre 1859 à Iaroslavl.
En 1878, il s’inscrit au conservatoire
de Moscou sur les recommandations de son directeur Nikolaï Rubinstein.
En 1883, il fait la connaissance de
Balakirev qu’il suit à Saint-Pétersbourg, et dont il subira l’influence.
De 1910 à 1923, il est professeur de
piano et de composition au conservatoire de Saint-Pétersbourg. Il émigre en
1923 et meurt à Paris l'année suivante, le 8 novembre 1924.
Pour découvrir la musique de Liapounov :
Rhapsodie
sur des thèmes Ukrainiens, pour piano et orchestre.
Concerto
pour piano n°1
Concerto
pour violon
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Citons également :
Mikhaïl
Ippolitov-Ivanov (1859-1935), élève de Rimski-Korsakov.
Sergueï
Taneïev (1856-1915), élève de Tchaïkovski,
eut pour élèves :
Sergueï Liapounov (1859-1924).
Nicolaï Medtner (1880-1951).
Alexandre Gretchaninov
(1864-1956).
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L'histoire de la musique russe se poursuit dans "La musique russe au 20e siècle".