Une histoire illustrée du Jazz
Sommaire de ce chapitre
Les débuts (1890 – 1920)
-
Le blues
-
La naissance du jazz
Les
années 20 – Nouvelle Orléans
Le Swing et les big bands des années 1930-1940
-
Les big bands
-
Les solistes
-
Les chanteuses
-
Le jazz manouche
Le
Be-bop des années 1940
Le
Cool jazz des années 1950
Le
Hard-bop de la fin des années 1950
Le Jazz modal des années 1960
Le
Soul jazz des années 1960
-
Le Jazz funk des années 1970
Le
Free Jazz des années 1960-1970
Le
Jazz Fusion
Autres styles
Les grands classiques du jazz
Petit lexique du jazz
~
Les
débuts (1890 – 1920)
Le jazz apparaît à la fin du 19e
siècle dans les rues de la Nouvelle-Orléans où se mélangent des musiques de diverses
origines, dont les worksongs, inspirés de la tradition musicale tribale de
l’Afrique de l’ouest et le negro spiritual qui donnera naissance plus tard au
gospel, ainsi qu’au blues.
Le blues
Le blues naît dans les états du sud
après la guerre de sécession. Organisé le plus souvent autour de trois accords
(tonique, sous-dominante, dominante), il se caractérise par l’utilisation de la
note bleue, ou blue note (quarte augmentée ou quinte diminuée de la gamme mineure) ajoutée à
la gamme pentatonique mineure, rendant celle-ci hésitante entre mode majeur et
mode mineur.
La note bleue à elle seule donne tout
son charme à la musique blues de par son ambiguïté harmonique car elle provoque
certaines dissonances propres au blues :
Gamme pentatonique mineure :
La Do Ré Mi Sol La
|
|
Gamme« Blues » :
La Do Ré Ré# Mi Sol La
|
|
Les chanteurs de blues célèbres
William Christopher Handy, (1873-1958),
chanteur et compositeur de blues, est souvent considéré comme « The Father of
The Blues » (« Le père du blues »).
Bessie Smith (1894-1937), parfois
appelée l'impératrice du blues, était la chanteuse de blues la plus populaire
des années 1920 et 1930.
Memphis Slim (1915-1988), de son
vrai nom John Len Chatman, chanteur et pianiste de blues, a perpétué la
tradition du boogie-woogie. Il est considéré comme un des représentants du
Chicago blues.
Mahalia Jackson (1911-1972), disciple de Bessie Smith mais,
contrairement à cette dernière, fermée à l'inspiration profane, est une
chanteuse de gospel considérée comme la plus grande voix du 20e siècle.
B. B. King (1925-2015) (B.B.
pour Blues Boy, de son vrai nom Riley B. King), est considéré comme l'un des
meilleurs musiciens de blues, et a eu une influence considérable sur de
nombreux guitaristes.
John Lee Hooker (1917-2001) est l'un
des chanteurs et guitaristes les plus importants du blues. Il influença
considérablement le blues-rock et le rock pendant tout le 20e
siècle.
La naissance du jazz
A la fin du 19e siècle des
orchestres de rue apparaissent dans le quartier de la Nouvelle Orléans nommé
Storyville. Ces « brass bands » ou fanfares de rue, exclusivement
composés de musiciens noirs, se produisaient lors de défilés, d'enterrements,
de bals ou de réunions publiques. Ils étaient composés d’instruments
à vent (trompettes, trombones, clarinettes) accompagnés par une section
rythmique comprenant tuba en guise de basse, banjo et washboards ou
tambours en guise de batterie.
Au début du 20e
siècle, le terme Jass, qui devient Jazz, apparait pour évoquer une nouvelle
musique mélangeant les syncopes du ragtime de Scott Joplin (1868-1917)
et l’esprit du blues.
Charles «
Buddy » Bolden (1877-1931) est considéré comme étant à l’origine du jazz
(qui ne portait pas encore ce nom), en créant une fusion originale de
ragtime, de musique sacrée noire, de musique de fanfare et de blues rural.
En 1917, l’Original
Dixieland ‘Jass’ Band, quintette américain formé de musiciens Blancs, marque
la naissance officielle du jazz en enregistrant le premier disque de jazz, «
Livery Stable Blues ».
Les années 20 – Nouvelle Orléans - Chicago
En 1917 le gouvernement fait fermer le quartier
de Storyville, ce qui a pour conséquence de faire émigrer les musiciens de la
Nouvelle-Orléans vers Chicago et New-York qui deviennent les nouvelles
capitales du jazz. C’est surtout dans les cabarets de Chicago que le style
« New-Orleans » va s’épanouir et se faire connaître, puis évoluer vers
le style « Chicago », qui se caractérise entre autres par une
importance accrue des solos.
En 1922, le cornettiste King
Oliver (1881-1938) crée le premier grand orchestre noir, le 'Créole Jazz
Band'.
Cette même année, Oliver ajoute à cet
ensemble un jeune cornettiste qu’il a fait venir de la Nouvelle-Orléans, Louis
Armstrong, avec qui il grave ses premières cires en 1923.
Au saxo
soprano et à la clarinette, Sydney Bechet (1897-1959) déploie un style
généreux et flamboyant qui fera de lui une vedette populaire, lorsqu’il
s’installera à Paris en 1949.
Louis Armstrong (1901-1971) est
le premier véritable improvisateur du jazz et en modifie le style en plaçant le
soliste au premier plan. Les enregistrements qu’il fait dans les années 1920
avec ses groupes « Hot Five »
et "Hot Seven" sont considérés comme les classiques absolus de jazz
et dévoilent la puissance créatrice d'Armstrong. Ces groupes n'ont jamais joué
en public, mais ont continué d'enregistrer jusqu'en 1928.
Jelly Roll Morton (1890-1941) quant
à lui ouvre la voie aux improvisateurs pianistes en exaltant la spontanéité des
solistes. Ses enregistrements avec son groupe des « Red
Hot Peppers » sont des modèles du genre.
Paul Whiteman (1890-1967),
surnommé « King of jazz », crée son propre style de jazz, dit symphonique. Il
commande à George Gershwin (1898-1937) la « Rhapsody
in blue » qu’il donne en public à l’Æolian Hall de New York, le 24 février
1924, avec le compositeur au piano.
George Gershwin effectue une fusion
entre musique classique et jazz. Ses mélodies originales intègreront rapidement
le répertoire des musiciens de jazz pour devenir des standards de jazz, tels
que le « Summertime » de son opéra « Porgy and Bess ».
Les principales œuvres de Gershwin :
Rhapsody in Blue
(1924) pour piano et orchestre
Concerto en fa
(1925) pour piano et orchestre
Trois préludes pour piano
(1926)
Un Américain à Paris
(1928) pour orchestre
Second Rhapsody
(1931) pour piano et orchestre
Ouverture cubaine
(1932) pour orchestre
Variations sur « I Got Rhythm
» (1934), pour piano et orchestre
;
Porgy and Bess
, opéra (1935)
Citons aussi le clarinettiste Johnny Dodds (1892-1940), que
l’on peut entendre ici dans « Wild
Man Blues » (1927).
Le Swing et les big
bands des années 1930-1940
Pendant les années 1930, le jazz connaît une vogue croissante qui culminera en 1938
avec le concert historique de l’orchestre de
Benny Goodman, au Carnegie Hall, salle de concerts classiques fréquentée par
la haute société.
Le style « swing », aussi
appelé « middle » ou « hot jazz », se caractérise par
une section rythmique composée de percussions et de contrebasse, sur lesquels
cuivres et autres instruments à vents s’expriment. Un des
éléments caractéristiques du jazz fait son apparition, le jeu en
« walking-bass » dans lequel le contrebassiste joue sur tous les
temps, ce qui donne l'impression d'une basse qui « marche » ...
On attribue à Fletcher Henderson,
pianiste, chef d'orchestre, arrangeur et compositeur, d’être le premier à
avoir configuré son groupe pour le swing.
Pendant quinze ans, de 1924 à 1939,
Fletcher Henderson va recruter pour son big band les meilleurs solistes du
moment.
Benny Goodman (1909-1986) marque
le début de « l’ère du swing ». Malgré la ségrégation ambiante, Benny
Goodman et Teddy Wilson (1912-1986) prouvent que des musiciens noirs et
blancs peuvent swinger ensemble sur scène.
Les big bands
Deux grands clubs de New York rêgnent sur le monde du swing : le Cotton Club et le Savoy Ballroom, où se
produisent les big bands comme ceux de Duke Ellington et Count Basie. Le grand
orchestre blanc de l’époque est dirigé par Benny Goodman.
Duke Ellington, pianiste autodidacte,
compose pour grand orchestre. Son jeu sur les timbres et les couleurs de
l'orchestre le fait même comparer à Stravinsky par certains critiques. Son orchestre
interprète également les œuvres de ses musiciens tels que Billy Strayhorn
(« Take the A train »).
Le bigband de Count Basie
(1904-1984), formé à partir de plusieurs groupes de Kansas City, a longtemps
été considéré comme le meilleur orchestre de jazz swing de tous les temps.
Les autres big bands fameux de l’époque
sont ceux de Cab Calloway (1907-1994), chef d'orchestre et chanteur, James
Melvin, dit Jimmie Lunceford (1902-1947), chef d'orchestre et
saxophoniste, et Glenn Miller (1904-1944), chef d'orchestre et
tromboniste.
Earl Hines (1903-1983),
pianiste, joue avec « Louis Armstrong and His Hot Five » en 1927 et
constitue l'année suivante un grand orchestre qu'il dirige jusqu'en 1947.
Chick Web ((1905-1939) est l’un
des plus importants batteurs de l'histoire du Jazz. À partir de 1930, il se
produit régulièrement avec son orchestre au Savoy Ballroom de Harlem.
Artie Shaw (1910-2004), de son
vrai nom Arthur Jacob Arshawsky, est clarinettiste et chef d’orchestre.
Musicien érudit tant en littérature que dans le domaine des arts, il est à
l’origine de nombreuses formations de jazz.
Les solistes
La trompette, instrument-roi du
New-Orleans est détrônée par le saxophone, avec notamment Lester Young et Coleman
Hawkins.
Coleman Hawkins (1904-1969), dit
Bean (haricot), est l’un des solistes majeurs de cette époque.
Lester Young (1909-1959), engagé
en 1936 dans l'orchestre de Count Basie, rencontre la chanteuse Billie Holiday,
avec qui il vivra une forte amitié, et Teddy Wilson, qui dirigera les petites
formations où ils pourront exprimer leurs talents.
Citons
aussi Johnny Hodges (1907-1970), prestigieux saxo alto du middle jazz, et
Benny Carter, saxophoniste, trompettiste, tromboniste, pianiste,
chanteur, arrangeur, compositeur et chef d'orchestre, qui fut l’un des grands
acteurs du jazz des années 1930 aux années 1990.
Parmi les pianistes, nous noterons Art Tatum (1909-1956) reconnu pour sa
virtuosité et ses improvisations créatrices, et Fats Waller (1904-1943),
pianiste, organiste, chanteur et comédien.
Le vibraphoniste Lionel Hampton (1908-2002)
rencontre Louis Armstrong en 1930 et enregistre avec lui le premier solo de
vibraphone de l'histoire du jazz avec « Memories of you ».
Le guitariste Charlie Christian (1916-1942), est avant
tout connu pour avoir donné à la guitare électrique une place de choix dans la
musique jazz, à écouter dans « Swing
to Bop » (1941).
Les chanteuses
Billie Holiday (1916-1959), dite
« Lady Day », devient, après une jeunesse difficile, l’une des plus
grandes chanteuses de jazz.
C’est dans l’orchestre de son mari Chick Web qu’Ella
Fitzgerald (1917-1996) fait ses débuts en 1935 avec « A-Tisket,
A-Tasket». On appréciera sa vitalité et son incomparable virtuosité dans
« How high the Moon », composé par Morgan Lewis en 1940, enregistré
en 1949.
Le jazz manouche
Des ensembles de Jazz, ayant leurs
spécificités musicales, commencent à voir le jour en Europe, notamment en
France, où le guitariste belge Django Reinhardt (1910-1953) popularise,
avec le violoniste Stéphane Grappelli (1908-1997), le jazz manouche,
un style de jazz sans percussions ni cuivres, mélange d’influences de musique
gitane (guitares, violons) et du swing. Ils créent en 1934 le Quintette du
Hot Club de France.
Le Be-bop des années 1940
Le
Be-bop apparait en 1942 avec notamment Charlie Christian, Thelonious Monk et
Kenny Clarke qui se réunissaient au cabaret « Minton’s » de Harlem. Sur le plan
de l'harmonie, c’est une musique plus technique et plus complexe que le jazz
traditionnel.
Le Be-bop se distingue du swing essentiellement par un rythme plus saccadé et une mélodie plus complexe
s’appuyant sur une
, la
8e note permettant, lorsqu’on monte la gamme sur un rythme
binaire, de jouer la dernière note (tonale) sur un temps fort.
Les
grands orchestres sont remplacés par de petits ensembles dans lesquels
l’expression individuelle est privilégiée et où les solos prennent une part
importante. Le quintet devient la norme et le jazz se joue maintenant dans des
clubs où l'on vient plus pour écouter que pour danser.
Charlie Parker (1920-1955) est
saxophoniste alto. Aussi surnommé Bird (« oiseau »), il est considéré comme
l'un des créateurs et principaux représentants du style Be-bop.
Dizzy Gillespie (1917-1993) est
trompettiste, auteur-compositeur-interprète et chef d'orchestre. Avec Miles
Davis (son élève) et Louis Armstrong, il est considéré comme l'un des plus
importants trompettistes de l'histoire du jazz.
Kenny Clarke est, avec Art
Blakey et Max Roach, un des inventeurs d'un style de batterie moderne et Be-bop.
Il a été membre fondateur du Modern Jazz Quartet.
Thelonius Monk (1917-1982),
pianiste et compositeur, est souvent considéré comme l'un des fondateurs du Be-bop.
Il est célèbre pour son style d'improvisation, ainsi que pour avoir écrit de
nombreux standards de jazz, tels que Round
Midnight (1947).
Le Cool jazz des
années 1950
Le cool jazz apparu dans les années
1950, en réaction à la frénésie du Be-bop, est d’un style plus calme et
apaisant. Il est aussi appelé « West Coast jazz », étant surtout joué
alors par les blancs de la côte ouest.
L'album fondateur du genre est
« Birth of The Cool » (1949) de Miles Davis, en collaboration avec
Gil Evans (arrangeur).
Les principaux représentants du cool
jazz sont Miles Davis (trompette), Chet Baker (trompette et chant), Dave
Brubeck (piano), Stan Getz (saxophone), Gil Evans (piano, arrangeur), Gerry
Mulligan (saxophone, piano, arrangeur), Lennie Tristano (piano), Lee Konitz
(saxophone) et John Lewis & the modern jazz quartet. Le chant est quant à lui sublimement
représenté par Sarah Vaughan.
Miles Davis (1926-1991),
trompettiste, mène le jazz dans une nouvelle direction, avec son album « Birth
of The Cool » de 1949, qui marque la naissance du cool jazz.
Sarah Vaughan (1924-1990) dite «
la divine », est considérée, avec Ella Fitzgerald et Billie Holiday, comme
l'une des trois plus grandes chanteuses de jazz.
Gerry Mulligan (1927-1996) est
saxophoniste, pianiste, chef d'orchestre, compositeur et arrangeur. Son
quartette sans piano avec le trompettiste Chet Baker est toujours considéré
comme l'une des formations les plus importantes de l'époque du cool jazz.
Chet Baker (1929-1988), bugliste,
trompettiste et chanteur, accède à la célébrité au début des années cinquante
aux côtés de Charlie Parker et de Gerry Mulligan. C'est un artiste au style
délicat et mélancolique qui a marqué l'histoire du Jazz.
John Lewis (1920-2001) et son « Modern
Jazz Quartet » (Milt Jackson : vibraphone, John Lewis : piano,
Percy Heath : contrebasse, Kenny Clarke : batterie) affinent la
musique Be-bop en mélangeant improvisation et composition. Ils réalisent une
synthèse entre jazz et musique classique, associant le contrepoint de la
musique baroque aux rythmes et couleurs du jazz.
Dave Brubeck (1920-2012), pianiste
et compositeur, mêle jazz et musique classique dans son premier album « Time
out »
Stan Getz (1927-1991) est l'un
des plus importants saxophonistes de jazz. Chef de file de l'école cool, il
combine une sonorité douce et feutrée apportée par le jeu novateur de son ainé
Lester Young
Gil Evans (1912-1988), arrangeur,
compositeur, chef d'orchestre et pianiste, est un innovateur important dans le
modern jazz : cool jazz, jazz modal et free jazz.
Lennie Tristano (1919-1978),
pianiste et compositeur, a eu une influence considérable sur le cours du jazz
dès le milieu des années 1940, et a été choisi comme maître par toute une
génération de jeunes instrumentistes.
Lee Konitz (1927- ) fait ses
premiers pas dans le Cool jazz en 1946, avec Lennie Tristano qu'il considère
comme l'inventeur du mouvement. Il a été le premier saxophoniste alto de cette
période à se libérer du modèle Be-bop et de l'influence de Charlie Parker.
Parmi les pianistes, notons aussi Erroll Garner (1923-1977), fameux pour son swing très personnel et son morceau
« Misty », composé en 1954, devenu un grand standard et repris par des centaines d'interprètes dans le monde.
Le cool Jazz donnera naissance plus tard à d’autres courants et
styles, comme la bossa nova brésilienne, mélange de cool jazz et de samba.
Le Hard-bop
de la fin des années 1950
Au milieu des années 1950, en réaction
contre le Cool jazz considéré comme une « musique de blancs », une
nouvelle génération de musiciens noirs crée un nouveau style plus énergique, le
« Hard-bop », qui retourne aux racines du jazz : le blues et le
gospel, dans une nouvelle rythmique, notamment grâce aux batteurs Art Blakey et
Max Roach.
Alors que le cool Jazz était
considéré comme un mélange de musique européenne et de jazz, le Hard-bop est considéré
comme un mélange de jazz et de musique africaine. Il est généralement
pratiqué par un quintette : piano, basse, batterie, saxophone ténor,
trompette.
On considère que c’est le concert
« Walking » de Miles Davis au festival de Newport, et le disque
éponyme de 1954, qui marquent l'avènement de ce nouveau style de jazz.
Les principaux autres acteurs du
Hard-bop sont le batteur Art Blakey et son groupe « The Jazz Messengers »,
le batteur Max Roach, le saxophoniste Sonny Rollins et le contrebassiste Charles
Mingus.
Le Hard-bop constitua un point de
départ, direct ou indirect, pour de nombreux autres styles de jazz dont le soul
jazz, le jazz modal, et le free jazz.
Art Blakey (1919-1990), batteur et chef d’orchestre, est
avec Kenny Clarke et Max Roach, un des inventeurs du style de batterie Be-bop
moderne et l'un des piliers du genre Hard-bop. Lui et son groupe, « The
Jazz Messengers », ont eu une grande influence sur le jazz.
Max Roach (1925-2007), batteur et compositeur, est considéré
comme l'un des batteurs les plus importants de l'histoire et travailla avec grand
nombre de musiciens de jazz
Charles Mingus (1922-1979),
contrebassiste, joue et compose une musique influencée par le gospel, basée sur
le Be-bop et le Hard-bop, dans laquelle il mêle des éléments appartenant à
toutes les époques du jazz.
Sonny Rollins (1930- ), saxophoniste et compositeur, est reconnu
comme l'un des musiciens de jazz les plus importants et influents de l'ère
post-Be-bop.
Le
Jazz modal des années 1960
Après avoir initié le Cool jazz et le
Hard-bop, Miles Davis initie le jazz modal avec « Kind
of Blue », l'album le plus célèbre et le plus vendu de l'histoire du
jazz, qu’il enregistre avec le saxophoniste John Coltrane (1926-1967),
autre figure de proue du genre, et le pianiste Bill Evans.
Le jazz modal utilise des gammes ou
modes musicaux qui rappellent des musiques anciennes ou exotiques. (Voir le
chapitre consacré aux modes : Les
modes musicaux). L’utilisation des modes musicaux permet plus de liberté à
l’improvisateur en limitant le nombre d’accords, le libérant ainsi des
contraintes harmoniques.
Le morceau « So what » de
Miles Davis en est un parfait exemple : il est joué dans le mode dorien
(mode médiéval de ré) utilisé successivement sur 2 fondamentales séparées d’un
½ ton. (ré puis mi).
De même « My Favorite
Things » de John Coltrane, après l'énoncé du thème, est composé de longues
improvisations envoûtantes sur seulement 2 accords.
Herbie Hancock (1940- ),
pianiste, est aussi un contributeur du genre. Il a joué avec de nombreux grands
jazzmen dans les années 1960 et a rejoint le Miles Davis quintet, avec lequel
il a redéfini le rôle de la section rythmique. Il enregistra aussi sous son
propre nom, en particulier l’album « Empyrean
Isles » d’où est tiré le morceau « Cantaloube Island ».
Le Soul jazz des années 1960
Le Soul jazz nait de la rencontre du
Hard-bop et du Blues, influencée par le gospel et le rythm and blues. Les
ensembles sont souvent des trios composés d’un piano ou d’un orgue Hammond,
d’un saxophone ténor et d’une batterie, ou de quintettes où aux 3 précédents
s’ajoutent trompette et basse.
Ray Charles (1930-2004) est
fréquemment considéré comme l'un des pionniers de la soul.
Jimmy Smith (1925-2005) avait
pour instrument de prédilection l’orgue Hammond B-3.
Aretha Franklin (1942- ) est surnommée
« The Queen of soul » ou encore « Lady Soul ».
Citons aussi Lee Morgan (1938-1972), trompettiste, et son plus grand
succès « The
Sidewinder » (1963).
De par son caractère groovy, on peut considérer le soul jazz comme
étant une passerelle entre le Hard-bop et le jazz funk à venir.
Le Jazz Funk des années 70
Issu principalement de la soul, le funk
se caractérise par la prédominance de la section rythmique (guitare, basse,
batterie) qui joue des motifs syncopés et la présence fréquente de cuivres ou
de saxophones.
James Brown (1933-2006), un des
initiateurs du funk, est fréquemment surnommé « The Godfather of soul ».
George Benson (1943- ),
guitariste, chanteur et compositeur, est remarqué par Miles Davis, qui
l'emploie sur l'album « Miles in the Sky », en 1967.
Herbie Hancock (1940- ), que
nous avons déjà rencontré dans le cadre du jazz modal, crée en 1973 un nouveau
groupe appelé « The Headhunters » avec lequel il publie un album
du même nom dans lequel on trouve certains de ses morceaux les plus connus dont
« Watermelon Man » (1962) et « Chameleon ».
Le Free Jazz des
années 1960-1970
Comme son nom l’indique, le free jazz
s’affranchit de toutes les règles établies du jazz, non seulement au niveau de
la grille harmonique dans la lignée du jazz modal, mais aussi au niveau du
tempo. Comme le Be-bop, il privilégie les petits ensembles et cherche à
exprimer plutôt qu’à plaire.
Le Free jazz apparait à la fin des années
1950 avec Charles Mingus et John Coltrane qui en sont les inspirateurs mais
surtout avec Ornette Coleman (1930-2015), saxophoniste, trompettiste,
violoniste et compositeur, qui en est le véritable initiateur. Son album
« Free jazz » de 1961 en est une référence incontournable.
Deux autres jazzmen « free »
célèbres sont :
Cecil Taylor (1929- ), pianiste,
qui est également l’un des créateurs du free jazz.
Albert Ayler (1936-1970),
saxophoniste, qui développe un son de saxophone ténor écorché vif au vibrato
extrêmement prononcé.
Jazz Fusion
Le jazz fusion ou « jazz
rock » apparaît une dizaine d’année après l’arrivée du Rock’n’roll, à la
fin des années 1960. Comme son nom l’indique, c’est un métissage entre le
jazz et le rock
C’est Franck Zappa (1940-1993)
qui l’initie avec son célèbre « Hot Rats » en 1969 et Miles Davis (encore
lui !) avec son album « Bitches Brew » sorti en 1970. Ils sont
suivis par Herbie Hancock, Chick Corea, John McLaughlin, Gary Burton...
Autres styles
Citons d’abord le latin jazz, dont
les spécificités sont, bien sûr, l’utilisation des percussions latines :
congas, güiros, timbales cubaines, claves et autres instruments typiquement
latinos.
On distingue plusieurs branches de
latin jazz dont la branche brésilienne comprenant entre autres la bossa nova, la
branche cubaine avec notamment le cubop, ainsi que la branche portoricaine.
L'Acid jazz est un courant musical qui
voit le jour à Londres dans les années 1990. Egalement appelé groove jazz,
il rassemble des influences funk, soul, jazz, hip-hop, disco. C'est une musique
qui utilise les techniques propres aux DJs comme le sampling, ou le scratching,
mais qui peut être aussi jouée instrumentalement en live.
Le Nu jazz apparait à la fin des années
1990 pour caractériser le mélange des musiques électroniques et du jazz
instrumental. Egalement appelé jazz-electro, ce courant musical va plus loin
que l'acid jazz par une utilisation intensive des samples et des instruments
électroniques.
Le Smooth jazz, très prisé aux Etats-Unis,
est une variante du jazz fusion, plus douce et plus accessible au grand public,
plus commerciale et moins appréciée des amateurs de jazz.
Par ailleurs, les styles que nous avons
vus précédemment cohabitent et s’entremêlent.
Le jazz participe aussi à l’origine de
nombreux courants de musique électronique que l’on peut explorer dans ce guide en
ligne : electronic-music-guide
Parmi les jazzmen contemporains, citons
Gary Burton (vibraphone), Steve Coleman (alto sax), Keith Jarrett (piano), Kenny
Garrett (saxophone alto), Charlie Haden (basse), Joe Henderson (saxophone
tenor), Manu Katché (batterie), Diana Krall (piano - chant), John McLaughlin
(guitare), Wynton Marsalis (trompette).
La France n’est pas en reste avec Martial
Solal (saxophone), Michel Portal (Piano), Michel Petrucciani, décédé en 1999
(piano), Jacques Loussier (piano) et Richard Galliano (Bandonéon).
~
On pourra aussi consulter la page jazz du site de Jean-Christian
Michel : https://www.jean-christian-michel.com/jazz.html
Les grands classiques du jazz
Petit lexique du jazz
AABA :
Structure la plus classique d'un standard de Jazz, comportant généralement 4
parties de 8 mesures : Les 1re, 2
parties pratiquement identiques (A), la 3e partie (B) appelée « bridge » ou «
pont », permet généralement de changer le climat du morceau.
After Beat
: Temps faible ou contretemps. En jazz, le deuxième et le quatrième temps sont
accentués.
Arrangement
: Transformation d’une œuvre musicale pour plusieurs voix ou instruments.
Ballade : Morceau,
généralement de 32 mesures, joué sur tempo lent, voire très lent.
Big Band :
Grand orchestre de jazz dont l’effectif est variable (entre 12 et 18 musiciens)
constitué de 3 sections instrumentales (saxophones, trombones et trompettes) et
d’une section rythmique.
Bœuf :
Equivalent français de l’américain Jam Session. (Voir l'origine de ce mot ici)
Break :
Phrase mélodique ou rythmique jouée sans l’accompagnement (en fin ou en début
de chorus).
Chorus : Improvisation
instrumentale ou vocale d’un soliste sur les harmonies d’un thème.
Combo (abréviation de combination) :
Petit ensemble de jazz, composé de trois à neuf musiciens.
Gospel : Littéralement
« good spelle » ou « bonne parole », c'est une forme de chant
religieux chrétien qui prend la suite des negro spirituals.
Grille :
Une grille harmonique est une succession d'accords sur laquelle est construit
un morceau. Elle sert en général de trame à l'improvisation.
Harmonie :
Combinaison de sons perçus simultanément. Formation et succession des accords
qui sous-entendent la mélodie ou l’improvisation.
Improvisation
: Mode d’expression libre. Les jazzmen improvisent des variations mélodiques
sur un thème donné et sur une trame harmonique.
Jam Session
: Réunion de musiciens au cours de laquelle chacun joue et improvise de façon
spontanée.
Pompe :
Au piano, faire la pompe consiste à jouer, de la main gauche, les notes de
basse sur le 1er et le 3e temps, et les accords sur les 2e et 4e temps de la
mesure. À la guitare, la pompe consiste à marquer d'un accord chaque temps de
la mesure en accentuant les 2e et 4e temps.
Ragtime : Style
essentiellement pianistique, syncopé (placé sur les temps faibles) et
entièrement écrit, très populaire entre 1850 et 1920. Il comporte une succession
de thèmes différents de 16 mesures.
Real Book (ou Fake book) : Livre de
partitions de jazz comportant la ligne mélodique du thème et sa grille
harmonique.
Riff :
Phrase brève mélodique ou rythmique qui vient ponctuer un morceau de façon
répétée.
Rythmique :
Ensemble composé d’un piano, d’une contrebasse, d’une batterie et parfois d’une
guitare.
Scat :
Intervention vocale où des onomatopées remplacent les paroles d’une chanson.
Section :
Un orchestre est souvent composé de deux sections. Les cuivres (trompettes et
trombones) et les anches (clarinettes et saxophones) sont regroupés dans la
section mélodique, tandis que la batterie, la contrebasse, le piano et la
guitare forment la section rythmique.
Slap :
Technique consistant à frapper les corde d’une contrebasse.
Sourdine :
Accessoire que l’on place devant ou à l’intérieur du pavillon d’une trompette
ou d’un trombone afin d’en modifier la sonorité et le timbre.
Standard :
Morceau issu du répertoire populaire et qui est devenu un classique à force
d’être joué par les musiciens de jazz.
Swing :
Pulsation rythmique caractéristique de la musique jazz des années 1940.
Tag :Petit
rajout placé après un élément de la structure. Souvent la simple répétition des
deux dernières mesures de la structure. Cela n'arrive qu'une seule fois par
morceau
Tempo :
Vitesse d’exécution.
Vibrato :
Procédé technique pour obtenir le tremblement léger et rapide d’un son
(instrument et voix).
Walking bass :
Manière d'accompagner à la contrebasse consistant à improviser une note par
temps selon une grille harmonique définie.
Work song :
Chant de travail, utilisé par les esclaves noirs pour rythmer leur travail. Il
s'agit, avec le blues et le ragtime, des origines du jazz.